Christel Nemouchi

Ce soir, j’ai RDV avec ma peur!

PAR CHRISTEL NEMOUCHI-

Nous y voilà! Dans quelques heures à peine,  le spectacle ambulant pourra commencer… S’il n’est pas déjà en route!
Ce soir, prenons garde à chaque coin de rue, aux impasses étroites , aux petites cours sombres, au moindre buisson en mouvement…Qui pourrait se vanter d’être l’abris à la nuit tombée? 
Halloween ou l’éloge du « Bouh » et des visages grimés et grimaçants! 

HALLOWEEN,  le goût du frisson…

 Un contexte anxiogène? Une époque propice aux questionnements? Comme un souffle nouveau, Halloween débarque dans nos villes et nos campagnes pour nous offrir l’occasion d’un frémissement différent. Serez-vous de ceux qui souhaitent vibrer d’effroi en famille ou entre amis, ou tiendrez-vous la distance avec les citrouilles et les balais volants?

Les avis demeurent partagés sur l’évènement. Pour certains, Halloween représente la symbolique d’une célébration issue d’une légende Irlandaise, et sacralisée sur le continent Américain. Un évènement purement marketing et commercial qui n’aurait pas sa place sur l’hexagone. Pour d’autres, c’est un moment de partage où règne l’esprit de fête et la bonne humeur. Le célébrer pourra procurer une expérience émotionnelle similaire au visionnage d’un bon  film d’horreur. Au delà de ces deux lectures, sous son étalage d’artifices glauques et parfois tonitruants, Halloween nous rappelle que bien que la menace existe, elle peut être apprivoisée.

maîtriser Sa peur…

Entre rétropédalage, tremblements, cris, pleurs ou chair de poule, notre sensibilité est singulière face la peur. Son action est essentielle dans l’organisme. Elle permet au corps de s’adapter aux dangers potentiels, auxquels nous sommes régulièrement confrontés. D’opter pour la réponse la plus adéquate, entre combat et fuite.

Quand le système d’alarme est en équilibre, ce qui est le cas chez la plupart des personnes, l’alerte se déclenche en situation de danger réel. Mais parfois il est défaillant. Lorsque notre sensibilité est exacerbée, lorsque nous sommes en proie au stress ou à l’anxiété, notre système d’alerte s’emballe. Faute de rationalité, nous manquons alors d’objectivité face aux situations . A contrario, la mécanique d’alerte peut également être en sous-régime, amenant certains sujets à rechercher les sensations fortes. Se mettant en état de danger permanent, pour se sentir exister. 

Pour maintenir l’équilibre dans un sytème d’alerte en bon fonctionnement,  il est nécessaire de l’entretenir, car notre survie en dépend. C’est ce qui  nous pousse inconsciemment à nous confronter à la peur. En provoquant les défis, nous maintenons les bons réflexes. Nous nous assurons que nous sommes encore capable de ressentir et de décider efficacement la bonne posture, face au danger. Nous provoquons alors  des situations de peur, que nous sommes capables de dépasser. Dans des contextes où nous conservons une grande part de contrôle (sports extrêmes, films d’épouvante, attractions foraines à sensations, fête d’Halloween…).

« LA PEUR EST UNE AIDE POUR LE GUERRIER. C’EST UN PETIT FEU QUI BRÛLE. 
IL CHAUFFE LES MUSCLES, NOUS REND PLUS FORT. LA PANIQUE VIENT LORSQUE LE FEU EST INCONTRÔLABLE, 
CONSOMMANT TOUS NOTRE COURAGE ET NOTRE FIERTÉ. »  

David Gemmel

Comprendre LE Signal d ‘alerte…

 A l’origine des premiers hommes, la peur avait pour fonction première de protéger leur intégrité physique face aux menaces concrètes de leur environnement (climat hostile, prédateurs, quête permanente de nourriture et de sécurité…). Progressivement, nos peurs ont évolué. Aujourd’hui, elles sont davantage d’ordre psychologiques, plus sournoises et irraisonnées. Nul besoin de signaux extérieurs pour entrer en état de panique. La peur se nourrit grassement, dans une époque qui lui est favorable: une actualité et des images anxiogènes,  une angoisse collective, une anticipation permanente de la difficulté à venir, le poids du jugement et des préjugés. Autant de facteurs révélateurs d’une société incapable de vivre sereinement son présent.

Sur le plan physiologique, l’expérience de la peur amène une manifestation physique. Celle-ci sert de stimulus et déclenche un signal d’alerte au niveau de notre amygdale cérébrale provoquant la diffusion d’une substance chimique appelée le glutamate, qui va agir sur deux zones de notre cerveau.  Dans un premier temps, le glutamate enverra un signal au niveau du mésencéphale. Puis, il diffusera un second message à l’hypothalamus responsable de la production des hormones du stress. Cette dernière orchestre le système nerveux autonome et régule la réponse du corps face au stress (circulation sanguine, fréquence cardiaque, pression artérielle, température, transpiration…). Ainsi, plus le degré de notre peur est élevé, plus notre rythme cardiaque et notre pression sanguine augmenteront, plus notre corps aura besoin de sécréter de la dopamine et de l’adrénaline, nécessaires pour organiser la réaction la plus adaptée aux circonstances. 
Voilà pourquoi la peur nous maintient dans un état de vigilance et de tension, indispensables à notre instinct de survie.

« LORSQUE TU ES LANCÉ DANS LA VOIE, L’ADRÉNALINE BOOSTE TES FONCTIONS »

François Damilano (alpiniste)

les bienfaits de la Peur

Redoutée, la peur n’est pourtant pas une ennemie. Les messages qu’elle nous délivre sont autant d’informations utiles pour apprendre à nous connaître. Notamment sur le plan de nos limites, nos besoins et de nos désirs. Comme l’évoque Thomas D’Ansembourg (écrivain-formateur-confériencier):
 « Il y aurait tout un dialogue à instaurer avec la peur. J’ai peur? Et bien, si j’écoutais un moment ma peur… Que vient-elle me dire? A quel endroit de mon corps se manifeste t-elle? » 
Derrière chaque peur subsiste un élan, un désir qu’il est important de comprendre pour progresser. Ainsi, en orientant les projecteurs sur ce qui nous motive, plutôt que ce qui nous freine, nous entretenons une meilleure re relation à nous-mêmes.  Nous mettons l’énergie au service d’une action qui nous anime.

La peur est parfois une juste remise en question de nos agissements. Par exemple, elle surviendra pour nous rappeler que nous redoutons l’échec et nous enseignera les vertus d’une bonne préparation. Bien que l’échec soit source d’apprentissage,  si nous ressentons de la peur à faillir,  nous veillerons plus facilement à fournir les efforts suffisants pour atteindre notre objectif de réussite. 

La peur est le berceau du courage. Elle nous oblige à nous mobiliser, à affronter ce qui nous paralyse, à dépasser ce que l’on pense souvent irréalisable. Dans sa fonction la plus noble, la peur réveille nos capacités et nous donne les moyens de devenir meilleur(e).

« Le véritable héroisme n’est pas l’absence de peur mais la canalisation de la peur vers l’action »

Doric Germain (Écrivain)

 
 
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